J’ai travaillé en tant qu’éducatrice au foyer de D., un établissement accueillant des
personnes adultes handicapées mentales. Certains résidants ont des modes de relation aux
autres très particuliers. Ils sont probablement liés à leurs pathologies, à leurs difficultés d’être.
Ainsi, David se parle à lui-même, il me parait intouchable. Il m’ignore comme si il n’avait pas
conscience de mon existence. Jean lui, me fait peur et refuse tout contact avec moi. Si je
l’approche, il s’éloigne en disant : « Ah ces femmes, ces femmes, cette Sandra. » Quant à
Marie, elle me « colle » en permanence et me suit partout, me regardant avec béatitude.
J’ai parfois la sensation d’être confrontée à un vide, de ne plus pouvoir penser face aux
résidants. Je me sens alors impuissante, mal à l’aise. Il m’arrive également d’avoir de la
difficulté à me sentir différenciée d’eux. Je suis alors envahie par la confusion. Dans ma
pratique au foyer, je dois me positionner face aux résidants. Je me suis donc interrogée sur
notre relation, qui est souvent sous le signe du trop ou du trop peu de contact, de lien.
Lors de cette réflexion, j’ai pu m’interroger sur ma pratique éducative au foyer de D.,
qui accueille des personnes handicapées mentales. J’ai pris pour exemple, ma rencontre avec
des résidants du groupe dans lequel j’ai travaillé. David me semblait insaisissable et me
renvoyait à un vide indescriptible. Au début, j’ai eu beaucoup de difficultés à faire des liens
entre mes observations sur lui. Ces différents éléments étaient autant de pièces d’un puzzle,
que j’ai essayé de rassembler, afin d’obtenir une image plus globale de lui. Jean me faisait
peur, je ne savais pas comment l’aborder. J’ai pu parler de lui et de ce qu’il me faisait vivre.
J’ai compris son attitude comme un moyen de défense, afin de se protéger des autres. Cela
m’a permis de l’approcher peu à peu. Marie en me collant, me mettait « hors de moi ». J’ai pu
accepter son attitude, en lui proposant des activités axées autour de la vie quotidienne. De
cette manière, nous avons pu coexister plus détachées l’une de l’autre.