Conclusion Aujourd’hui encore, alors même que les pratiques éducatives en milieu ouvert ont évolué, que les références théoriques se sont diversifiées, la solitude de l’éducateur de milieu ouvert reste un a priori tenace, la pratique la plus courante, une sorte de signe inébranlable, identitaire de cette fonction. Intervenant seul, à défaut d’être toujours le seul intervenant, dans les familles des mineurs dont il s’occupe, maître de ses rendez-vous et de ses déplacements, selon une idée répandue, le travailleur social en milieu ouvert agirait de manière autonome – en libéral, et sans contrôle est-il souvent dit - et n’aurait de ce fait peu de compte à rendre sur sa pratique. C’est pour répondre en partie à l’évolution des pratiques éducatives qui prennent de plus en plus en compte le travail sur la structure familiale, et à cette nécessité d’une mise à voir de nos pratiques que nous avons pensé le travail à deux et que nous avons rompu avec une certaine tradition. Le suivi des familles à deux travailleurs sociaux n’est pas un mode d’intervention simple.
Il faut du professionnalisme, une certaine écoute de l’autre, une entente et une confiance indéniable. Le regard de l’autre, le partage de la relation, des responsabilités ne sont pas toujours des éléments de la pratique faciles à gérer. Le travail à deux est venu, pour nous rompre ainsi avec une certaine pratique, des habitudes et même si le cadre de l’intervention est bien toujours le même celui de l’article 375. et de sa mission, apporter aide et conseil (375.2) : le partage des responsabilités, du travail, mais surtout l’obligation de rendre compte de sa pratique ont été renforcés. Le questionnement sur notre pratique n’est de fait plus vécu comme une intrusion dans une relation privilégiée entre la famille et le travailleur social. Nous sommes allées affirmer la valeur structurante de la loi et le partage qu’elle effectue entre le possible et l’interdit dans les familles à deux. En plus d’un confort dans le partage des responsabilités, cette forme d’intervention augmente la représentation de cette loi et en parallèle favorise l’existence du cadre de l’intervention.
La loi vient également rappeler que le comportement et même la souffrance de chacun importe à la collectivité. Ainsi un des objectifs de la mesure est d’obtenir un changement de la situation, du comportement de chacun (pas un changement de la personne) et parfois moins de souffrance, et surtout que ce changement ne soit pas une adaptation de surface. Pour cet objectif le travail à deux nous a paru obtenir quelques avancées maintenant reconnues. Si nous décrivons en les séparant les différents moments de l’A.E.M.O ainsi : Observation, Analyse, Action éducative et accompagnement. Ils nous a semblé que ces trois moments là étaient renforcés par le fait d’être deux, l’observation par l’autre regard, l’analyse par le regard de l’autre, et l’action par une modélisation , une référence à l’autre dans sa différence. Tout cela se ferait dans un rappel symbolique de la loi plus marqué.
Et alors que le travail à deux n’est pas comptabilisé par les financeurs qu’il est plus toléré que mis à une place définie au service il nous a apporté dans le travail, moins d’usure ( ce dont il est souvent question dans le métier), un partage des responsabilités et le fait d’être plus sereins. Ceci ne paraît pas négligeable quand le rapport 2000 de Messieurs Noves et Cathala souligne que des placements sont effectués parce que les travailleurs sociaux ont peur de la dégradation de la situation, de la violence des familles, de leur mise en cause….. Maintenant cette pratique de travail à deux a une certaine ancienneté sur la juridiction de M, elle fait partie d’une certaine identité de l’équipe et elle est revendiquée comme telle. Désormais elle a sa place dans un projet éducatif et nous pensons important de partager un certain savoir-faire.
Catégorie: | Autre Educateur spécialisé |
Type de fichier: | application/pdf |
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