J’ai continué à travailler à la boutique solidarité une fois diplômée. Je retiens de cette expérience :
1-qu’une grande quantité de personnes en souffrance échappent à tout dispositif.
2-que la boutique solidarité n’attire pas les personnes les plus en détresse. Cela est en partie du au fait que les plus marginalisés demeurent méfiants envers toute institution.
3-que ces personnes sont le plus souvent dans une grande détresse psychique, où la parole n’est plus là.
Suite à cette formation, il m’est apparu logique de la poursuivre en éducateur spécialisé, d’une part pour étayer ma pratique au regard de la théorie, et d’autre part d’intervenir en stage dans un dispositif dit « allant vers » au sein de l'équipe mobile sociale.
Avant de vous présenter mon hypothèse, je souhaite faire un rappel concernant la politique contre l'exclusion.
Le préambule du programme de lutte contre les exclusions débute par :
« La lutte contre les exclusions est un impératif national fondé sur le respect de l’égale dignité de tous les êtres humains et une priorité de l’ensemble des politiques publiques de la nation. » Art 1er de la loi du 29/07/98.
Cette loi est née, en partie du constat suivant : 25 ans de chômage, 6 millions de personnes dépendent des minima sociaux, 200000 personnes sont sans abri. Donc le gouvernement précédent (avec le projet de loi de cohésion sociale) et actuel ont préconisé de légiférer l’action et la mise en œuvre des moyens nécessaires au rétablissement de l’égalité de tous au pays des Droits de l’Homme.
Par cette loi, L’Etat affiche sa volonté de lutter contre les exclusions. Celle-ci prévoit notamment la nécessité d’un travail à proximité auprès des plus exclus, marginalisés, désaffiliés, en errance et bien sûr sans domicile fixe.
C’est donc au sein d’une équipe de travailleurs sociaux intervenant auprès de personnes en situation de grande précarité -là où elles se trouvent-, que j’ai décidé de faire mon stage de professionnalisation. Dans ce type d’intervention, hors institution, l’enjeu de la rencontre, prend selon moi, tout son sens. En effet, les enjeux et la forme de l’intervention ne sont pas ici guidés par les impératifs d’une prise en charge, sous la forme de services standardisés (nourriture, soins, couvertures…) mais par la nécessité d’engager une relation qui permette à l’autre de retrouver une place de citoyen. Une telle relation ne peut vraiment s’engager que s’il y a « rencontre ».
Je m’attacherai à présenter ma démarche et mes orientations de travail en me basant sur les hypothèses suivantes :
Pour le travailleur social, l’intervention auprès des personnes en grande difficulté ne trouve pas son fondement dans la réponse au besoin. Elle réside dans une démarche « d’aller vers ». Pour permettre la rencontre des personnes démobilisées. Elle pourrait ainsi permettre aux sujets de réintégrer une dynamique entre eux et leur environnement en créant l’espace d’une relation éducative. Ce travail ne peut s’effectuer que par une démarche à moyen et long terme.
Je débuterai dans une première partie par l’évolution de l’exclusion dans notre culture, afin de définir ensuite qui sont les exclus, quels sont leurs parcours, et enfin, de montrer l’évolution de la prise en charge de ces exclus.
Après avoir décrit le dispositif dans lequel j'ai effectué mon stage ainsi que les problématiques liées à ce type d'intervention, je me pencherai sur les enjeux de la rencontre.
Enfin, je terminerai en abordant le travail en réseau, composante essentielle de ce type de dispositif, le tout en rapport avec ma pratique professionnelle.
Mon objectif est donc de comprendre le rôle des attitudes de l’éducateur dans cette rencontre avec ces individus en grande difficulté.
Mon objectif est aussi d’appréhender les dimensions qui entrent en jeu dans la rencontre. Pourquoi certaines relations se font-elles et d’autres pas ?
Les émotions de l’éducateur sont en premier lieu perçues par les individus en situation précaire. S’ils se sentent jugés, surprotégés, manipulés, toute rencontre devient alors impossible.